La distanciation sociale, pour ne pas se mêler à d’autres classes !

Distanciation sociale

Les mots ont du sens et lorsque je souhaite retrouver le sens des mots, il m’est familier d’aller consulter le dictionnaire de notre Académie Française. Les mots « distanciation sociale « font l’objet d’une note particulière de nos Académiciens que je reproduis en intégralité ci-dessous.

« L’expression distanciation sociale est une transcription de l’anglais social distancing ; elle est assez peu heureuse, et ce, d’autant moins que ce syntagme existait déjà avec un tout autre sens. On le trouve en effet dans Loisir et culture, un ouvrage, paru en 1966, des sociologues Joffre Dumazedier et Aline Ripert ; on y lit : « Vivons-nous la fin de la “distanciation” sociale du siècle dernier ? Les phénomènes de totale ségrégation culturelle tels que Zola pouvait encore les observer dans les mines ou les cafés sont en voie de disparition. » Distanciation, que les auteurs prennent soin de mettre entre guillemets, désigne le refus de se mêler à d’autres classes sociales. On suppose pourtant que ce n’est pas le sens que l’on veut donner aujourd’hui à ce nom. Distanciation a aussi connu une heure de gloire grâce au théâtre brechtien, mais même s’il s’agit, comme on le lit dans notre Dictionnaire, pour le spectateur, de donner « priorité au message social ou politique que l’auteur a voulu délivrer », il est difficile de croire que ce soit le sens de la « distanciation sociale » dont on nous parle aujourd’hui. Peut-être aurait-on pu parler de « respect des distances de sécurité », de « distance physique » ou de « mise en place de distances de sécurité », comme cela se fait dans d’autres domaines ? »

Le refus de se mêler à d’autres classes sociales ?

Est-ce que toutes les personnes qui utilisent cette malheureuse expression expriment leur refus de se mêler à une autre classe ? Même si quelques personnes se sentent d’un esprit supérieur à tous les autres, je ne le pense pas. C’est une paresse intellectuelle qui comme le mouton de Panurge, « suit instinctivement ce que fait le plus grand nombre et se fond dans un mouvement collectif sans exercer son esprit critique, ni seulement faire preuve de l’intelligence qu’on peut espérer d’un être humain. » (Wikipédia)

Étienne de la Boétie, comme votre discours sur la servitude volontaire écrit en 1548, peut encore résonner dans ce siècle, à défaut de rallumer les lumières de la raison.

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« Il est incroyable de voir comme le peuple, dès qu’il est assujetti, tombe soudain dans un si profond oubli de sa liberté, qu’il lui est impossible de se réveiller pour la reconquérir : il sert si bien, et si volontiers, qu’on dirait à le voir qu’il n’a pas seulement perdu sa liberté, mais bien gagné sa servitude …». (E. de La Boétie – 1548)

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