Le préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon bricolerait-il le droit ?

Pas de communiqué, pas d’arrêté, pas d’expression publique, pas de réponse aux mails, le préfet doit être en vacances, mais …. Mais des mesures s’appliquent d’une manière disparate et sans explication aucune. Nous apprenons par SPM 1ère que le passe sanitaire ne s’appliquera pas dans l’archipel. Quid du reste ? De l’obligation vaccinale ?

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La loi est parue le 5 août et le décret d’application qui permet l’application du passe sanitaire et l’obligation vaccinale pour certaines personnes vient d’être publié. (Décret n° 2021-1059 du 7 août 2021)

Ainsi, le dispositif d’application de ces mesures est désormais complet. L’article 2 de ce décret précise bien que le passe sanitaire et l’obligation vaccinale sont applicables chez nous.

« Les dispositions du présent décret sont applicables aux collectivités de l’article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie dans les mêmes conditions que les dispositions du décret du 1er juin 2021 susvisé qu’elles modifient. »

Des personnes concernées par la vaccination obligatoire demandent pourquoi des mesures, qui relèvent de la même loi, du même décret, sont appliquées différemment ?

Le préfet peut décider d’adapter l’application de la loi au contexte particulier de l’archipel. C’est ainsi que les masques ne sont plus obligatoires, que des tests PCR négatifs sont imposés pour entrer dans le territoire, qu’une septaine obligatoire est imposée à toutes les personnes qui ne sont pas vaccinées et simplement conseillée aux autres, etc. Ces mesures ne sont contestées par personne. Elles protègent l’archipel qui ne connait pas l’épidémie depuis le début. (seuls 30 tests positifs depuis mars 2020 et aucune hospitalisation covid)

Depuis, par la loi du 5 août, le passe sanitaire est généralisé et l’obligation vaccinale s’impose quasiment à toutes les personnes en contact avec un public fragile, mais sous certaines conditions fixées par le Conseil constitutionnel, à savoir : « Les mesures susceptibles d’être prononcées dans le cadre du régime de gestion de la sortie de crise sanitaire ne peuvent être prises que dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19« .

Ainsi, le préfet de l’archipel a fait savoir à SPM la 1ère que le nouveau passe-sanitaire ne sera pas imposé dans l’archipel. En cela, il respecte la décision du Conseil constitutionnel qui a décidé que les mesures « doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu et cette décision se conclue ainsi : « Il y est mis fin sans délai lorsqu’elles ne sont plus nécessaires« 

Les mesures, non nécessaires dans l’archipel, sont un dispositif qui englobe et le passe-sanitaire et l’obligation vaccinale. Alors, si le préfet tient compte des risques sanitaires, des circonstances de temps et de lieu pour le passe sanitaire, pourquoi ne le fait-il pas pour l’obligation vaccinale ?

Le Conseil constitutionnel décide ensuite dans son aliéna 23, que « Le juge est chargé de s’assurer que de telles mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu’elles poursuivent. »

Il n’y a aucun écrit, aucun communiqué, aucun arrêté préfectoral et pourtant un employeur exerce une pression sur les personnes non-vaccinées. Pourquoi ?

Le préfet semble avoir décidé de tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel pour ne pas imposer le passe sanitaire. S’agissant du même dispositif, visé par la même décision du Conseil constitutionnel, les agents hospitaliers et autres, peuvent en déduire que l’obligation vaccinale n’est pas imposée dans l’archipel !

Sans décision écrite du préfet, sans note explicative de l’employeur à l’adresse des personnes concernées, à Saint-Pierre-et-Miquelon, elles seraient en droit de refuser légalement une vaccination qui ne tient pas compte des décisions du Conseil constitutionnel.

Le préfet ne peut pas dire d’un côté, « je tiens compte de la décision du Conseil constitutionnel » et dire de l’autre « je n’en tiens pas compte »… sauf à produire un arrêté qui motive sa décision ! Donc ce qui vaut pour le passe-sanitaire doit valoir pour la vaccination obligatoire.

Conclusion :

Nous n’avons pas à juger ici des raisons qui conduisent certains professionnels, agents administratifs, ouvriers, techniciens, soignants, médecins, à refuser la vaccination. Mais puisqu’ils sollicitent une explication, ils sont en droit de l’obtenir. Or à ce jour, c’est « tu dois être vacciné et tu n’as rien à dire, sinon t’es plus payé ! »

Si le passe-sanitaire n’est pas appliqué dans l’archipel, qu’il ne sera pas utile de le présenter pour rendre visite à une personne hospitalisée ou à la maison de retraite, pourquoi la vaccination qui relève de la même loi et du même décret devrait s’appliquer ?

Le préfet agit-il dans le secret d’un Conseil de défense du territoire ? Serait-il entouré d’élus au garde-à-vous ? Muets ?

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Conseils aux salariés concernés non-vaccinés :

Nous sommes de moins en moins dans un état de droit et il faut en tenir compte. Normalement, toute décision doit reposer sur des éléments de droit opposables. Ici, nous sommes en présence d’un silence préfectoral qui murmure le droit de façon biaisée. Vous, vous êtes au cœur d’un dispositif local trouble et il faut toujours anticiper le pire avec les aficionados du droit local, parlé et non écrit.

1- Vous risquez de perdre votre rémunération si vous n’êtes pas vacciné d’au moins une dose avant le 15 octobre ! (décret 2021-1059 : « À compter 15 septembre 2021 et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus, ce justificatif doit être accompagné d’un justificatif de l’administration d’au moins une des doses d’un des schémas vaccinaux ».)

2- Jusqu’au 15 septembre, vous devriez produire (?) un test PCR négatif toutes les 72 heures pour accéder à votre lieu de travail.

Si vous êtes motivé, vous pouvez ne pas produire ce test et attendre que votre employeur vous signifie cette obligation. À partir de là, c’est-à-dire à partir de la décision écrite qui vous ordonne d’exécuter ce test pour travailler, ou par tout autre moyen de preuve, vous pouvez saisir directement le juge des référés du tribunal administratif de l’archipel par la voie d’un « référé-liberté ». Il en sera de même si le préfet prend un arrêté en ce sens. (un modèle à compléter ICI)

Il est bon de rappeler à cette fin que le Conseil constitutionnel encourage cette voie en son alinéa 33 cité plus haut :  » Le juge est chargé de s’assurer que de telles mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu’elles poursuivent. »

Cet article peut vous être utile pour vous armer : « Stratégie juridique générale pour salariés qui veulent résister à la vaccination obligatoire » ou celui-là, « Comment échapper à la suspension sans salaire dans la fonction publique ? »

Enfin, vous noterez l’absurdité de ces mesures qui vous imposent une vaccination avant le 15 octobre par une loi dont les effets s’arrêtent le 15 novembre ! Mais…. (à suivre)

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Profitez de la fête Basque :

Pas de masque obligatoire, pas de passe-sanitaire

Que du bonheur !